mardi 3 mars 2015

Avertissement

Normalement, dans un blog, les articles les plus récents sont ceux qui apparaissent en premier, les plus anciens étant accessibles à la fin par un menu déroulant.
Par contre, pour faciliter la lecture, les articles de ce blog, maintenant terminé, sont classés par ordre chronologique.
Pour cela, les dates d'édition ont été modifiées, les articles plus anciens devenant les premiers à la lecture. Ce qui fait que la mention de bas de page "articles plus anciens" renvoie en fait aux articles suivants, plus récents.


L'introduction de Jean-Marie Mengin


GR 7

Sentier Vosges - Pyrénées

(Ballon d’Alsace – pont del riu Runer)

-1430 km-



Dans les années cinquante, le Comité National des Sentiers de Grande Randonnée esquisse un chemin directeur entre Vosges et Pyrénées, afin de rallier l’Andorre. À charge pour chaque région concernée d’affiner et de tracer son tronçon. L’histoire du GR 7 commence au mont Aigoual à l’initiative du docteur Paul Cabouat et d’une équipe de randonneurs locaux. Le premier tronçon, de La Bastide-Puylaurent (Lozère) à Labastide-Rouairoux (Tarn) fut ouvert au public en 1958. Par la suite, le balisage sera réalisé dans les autres régions.

Le GR 7 relie à travers la France les Vosges aux Pyrénées. Il débute dans les Vosges au Ballon d'Alsace, traverse le massif vosgien d'est en ouest, touche les contreforts est du Bassin parisien, le plateau de Langres, le plateau de Côte d'Or et traverse tout le Massif central par sa bordure orientale. Passant la plaine du Languedoc, il se termine dans les Pyrénées en Principauté d'Andorre. Conçu comme un itinéraire de crête, il suit au plus près la ligne de partage des eaux Mer du Nord, Manche ou Atlantique – Méditerranée.
Ce faisant, il traverse le parc naturel régional des Ballons des Vosges, le parc naturel régional du Pilat, le parc national des Cévennes et le parc naturel régional du Haut Languedoc*.

J'ai parcouru ce sentier par tronçons, généralement à la semaine, de 1995 à 2001. Je l'ai effectué seul, épaulé par Viviane que je retrouvais (sauf exception) le soir à l'étape. Nos chiens, Crunchi puis Oscar, m'ont souvent accompagné dans ma randonnée.

* Le parc naturel régional des Monts d’Ardèche n’a été créé qu’après mon passage.



https://gr7dejmmengin.blogspot.fr


Mardi 5 septembre 1995 : Ballon d'Alsace – col des Croix.

Arrivés vers midi sur les contreforts du Ballon d'Alsace, Viviane et moi mangeons dans notre fourgon Trafic. Viviane me dépose ensuite à la ferme-auberge du Ballon. 
Par le GR 5, je grimpe jusqu'au sommet.

Le Ballon d'Alsace (1247 m), origine du GR 7, est le haut sommet le plus méridional des Vosges. Limite des départements du Haut-Rhin, des Vosges et du Territoire de Belfort (entre Alsace, Lorraine et Franche-Comté), ligne de partage des eaux Mer du Nord – Méditerranée, il est situé au cœur du parc naturel régional des Ballons des Vosges. C'est également un point de passage du GR 5 (sentier Mer du Nord – Méditerranée).
Le GR 7 débute à la table d'orientation, en un parcours commun avec le GR 59 (sentier Vosges – Jura).

Je commence à marcher à 14h, par un temps frais mais ensoleillé, sur les Hautes Chaumes, pelouse subalpine au-delà de la limite supérieure des arbres. Les marques blanches et rouges du GR mènent à la statue équestre de Jeanne d'Arc et descendent au col du Ballon (1171 m). Coupant la D465, je passe devant le monument national des Démineurs et entre en forêt.
A travers une hêtraie d'altitude, le sentier longe la limite entre Vosges et Territoire de Belfort puis entre Vosges et Haute-Saône. Il dévale ensuite brusquement vers le col du Stalon (958 m), carrefour de chemins forestiers et ligne de partage des eaux. On y rencontre le GR 533, le sentier au rectangle vert du Club Vosgien. Les trois GR vont se diriger de concert sur le versant saônois vers le col du Luthier, au milieu des digitales pourpres et des plantes de mégaphorbiaie. Peu après le col, le versant sud-est du Ballon de Servance apparaît, dénudé et buissonneux.
A hauteur d'une murette de pierre, le GR 59 se poursuit en Franche-Comté. Le GR 7 et le GR 533 passent sur le versant lorrain (département des Vosges). Je traverse des chaumes et monte vers une corniche à 1170 m, sous le Ballon de Servance. Couronné par l'ancienne forteresse et des installations militaires, le sommet du ballon  est interdit à l'accès. Il culmine à 1217 m.
Le sentier perd rapidement de l'altitude, dévalant sous forêt les nombreux lacets du sentier de l'If. Au chemin forestier des Gouttes du Ballon, le GR 7 se sépare du GR 533. Il va se poursuivre sous les flancs du ballon, dans une forêt de conifères, cheminant en pente douce. Il passe à côté du chalet ONF de Longeligoutte, emprunte un large chemin forestier jusqu'à la pierre du Percepteur. Il atteint un groupe de maisons, les Mines, et monte alors dans des friches jusqu'au Trou de l'Enfer.
C'était autrefois le point de passage d'une voie antique, abandonné depuis le XIXe siècle au profit du col des Croix.
Continuant vers l'ouest, j'arrive justement à 18h15 au col des Croix, là aussi ligne de partage des eaux, point de passage des Vosges comtoises entre Haute-Saône et département des Vosges.
Viviane m'attend au col.

Nous allons passer la soirée dans la nature au lieu-dit « les Sapins d'en haut », près d'une auberge isolée, à côté d'un enclos à chevaux.
Barbecue. Belle soirée lumineuse… Nous passons la nuit dans le Trafic.



                                                                                                                                               

Mercredi 6 septembre 1995 : Col des Croix – ferme de Larraye.

De retour au col des Croix où Viviane m'a déposé pour 10h, je poursuis mon chemin dans une direction générale nord-ouest, sur la bordure du plateau des Mille-Etangs.
Le GR 7 emprunte la route de crête (route des Forts, ou route des Etangs) et contourne le fort de Château-Lambert. Il gagne l'étang de la Plaine puis l'étang de la Peau et quitte alors le bitume pour descendre le sentier de la Pécherotte, sur le versant lorrain. J'atteins le Pré Martin et, à travers des pâturages, parmi les fougères et les genêts, je poursuis à flanc jusqu'aux fermes de Grammont. Belle promenade ensoleillée, vue sur la vallée de la Moselle et les sommets en vis-à-vis.
Je parcours ensuite le bois de Hétray ; je continue en traversant des hameaux, côtoyant des fermes et des pâturages. Je passe près d'un étang et atteins à nouveau la crête. Par un chemin herbeux, je rejoins la route des Forts à hauteur de l'étang Xafin (743 m).
Je chemine sous le soleil le long de la route. Viviane me double avec le Trafic.
Lieu de rencontre des deux provinces, les Vosges comtoises, territoire façonné par les glaciers, présentent une douceur mélancolique et pénétrante : de nombreux étangs et une végétation nordique parsemée de genêts et de bruyères…
Je chemine le long d’étangs et de clairières. J'atteins le sentier de Ronde et me dirige vers le nord-ouest, longeant une clairière puis coupant une forêt d'épicéas. Je passe au-dessus de l'abri forestier de Pré Daval et atteins à 13h15 le col du Mont des Fourches (620 m), sur la limite départementale. J'y retrouve Viviane.

Nous allons manger à proximité, dans un virage de la route qui descend à Rupt-sur-Moselle. Des gendarmes s'arrêtent : vérification d'identité. « Vous comprenez, il y a des maraudeurs… »

L'après-midi, j'emprunte un chemin qui grimpe depuis le col à travers bois et clairières jusqu'à la ferme du Champ Rossay. Un chemin de char monte alors dans des pâturages, passe en Haute-Saône. Le GR 7 rejoint le GR de pays Châteaux et villages de Haute-Saône. Il emprunte un sentier herbeux en bordure de plantations, passe en contrebas du fort de Rupt. De retour dans le département des Vosges, il traverse des forêts d'épicéas et de hêtres. Une piste sableuse s’élève jusqu’à la ferme de Halotey, puis un sentier herbeux débouche sur une voie de débardage menant au chalet de la Fouillotte (abri du Club Vosgien).
Le GR descend par le chemin des Têtes à Fondromey. C'est ici une région minière. Les voies de passage sont encombrées de débris de minerais. Dans un beau cirque glaciaire, se trouve une entrée de mine de spath fluor.
Le GR se poursuit à flanc sur les hauteurs de la vallée de la Moselle, côtoie des étangs et des habitats dispersés. A la ferme du Hanot, il emprunte un chemin caillouteux, rejoint deux anciennes habitations, aujourd'hui résidences secondaires fleuries.
Après la traversée d'un bois, je rejoins la ferme de Larraye sur une petite route en lacets dominant Maxonchamp. Il fait encore beau. J'ai parcouru 22 km. Viviane m'attend là.

Nous retournons pour la soirée et la nuit dans une forêt, près d'un étang où je suis passé ce matin, au bord de la route des Forts.
La lune éclaire encore le paysage, mais des nuages la voilent peu à peu…


Jeudi 7 septembre 1995 : Ferme de Larraye – Remiremont.

Les nuages de la nuit sont bien là. Chargés d'eau et menaçants, ils sont entraînés rapidement par un vent latéral.
Je reprends tout de même la randonnée à 10h15, au départ de la ferme de Larraye. Mais la pluie se met bientôt à tomber. Je m'abrite sous un arbre. Inutile ! J'enfile la cape par dessus le sac à dos et je continue sous une pluie battante sur la petite route.
Au rond Xatier, il devrait y avoir une belle vue, mais l'horizon est bouché. Je m'engage dans des chemins herbeux longeant des pâturages. La pluie redouble d'intensité. Je remonte jusqu'à la Beuille, je quitte le parc naturel régional des Ballons des Vosges  et je rejoins la route des Forts à la barre de la Vigotte (704 m).
La pluie s'arrête. Je descends à la Croisette d'Hérival, source de la Combeauté, à l'entrée d'un vallon humide. Le restaurant, pour l'heure, est désert.
Maintenant le GR va se poursuivre sous forêt, descendre peu à peu vers la vallée de la Moselle et gagner les premiers faubourgs de Remiremont. La pluie s'est remise à tomber, les chaussures sont trempées. Je domine la ville et  pénètre dans un parc public, la promenade Charles-David. Par le calvaire et le long du Champ de Mars, je descends vers le centre de Remiremont, ville au riche passé historique, et berceau de l'industrie textile dans les Vosges. J’emprunte la rue du Calvaire. C’est d’ailleurs au numéro 6 de cette petite rue que je suis né !
 Il est 13h15. Près de l'église, Viviane, dans le Trafic, me fait des appels de phares.

Nous allons chercher un endroit pour manger dans la voiture.
Ensuite nous irons nous installer dans une clairière isolée. A cause du mauvais temps, nous y passerons l'après-midi. Peu de sorties (et avec bottes et capes). On effectue toutefois une balade à Remiremont à la faveur d'une éclaircie.


Vendredi 8 septembre 1995 : Remiremont – calvaire Gérardfaing.

Nous passons encore une grande partie de la journée dans le Trafic au milieu de la clairière, à cause de la pluie. Nous faisons tout de même une incursion à Remiremont dans la journée.

A 16h30, la pluie semblant se calmer, je tente une sortie sur le GR 7.
A l’ouest de Remiremont, je rejoins la chapelle Ste Anne. Le GR se poursuit en milieu ouvert sur de petites routes, longeant des fermes.
A Remiremont, c'est la fin des Hautes Vosges cristallines. Ce sont maintenant les Vosges gréseuses que le GR aborde.
Quelques gouttes de pluie à nouveau. Le GR monte par des chemins herbeux à travers des taillis puis des conifères. J'atteins le Haut-des-Faignes sur un plateau à 528 m, et passe à côté d'un chalet forestier où nous reviendrons ce soir. Je longe ensuite l'étang de la Plaine, atteins le hameau de Pusieux. A travers une forêt mixte, je descends au pont du Founé qui franchit la Niche. Dans les hautes herbes mouillées puis à travers champs, je rejoins Mailleronfaing.
Je débouche sur la Vôge, plateau de grès bigarré, bordure sud-ouest du massif vosgien. Région de transition aux paysages ondulés, c'est le domaine de belles et profondes forêts de chênes d'une qualité exceptionnelle et de hêtres.
Je traverse ce hameau agricole sous un ciel toujours chargé, pour me diriger vers le calvaire Gérardfaing, à une intersection de routes sur un triste plateau dénudé où la vue porte loin. Viviane m'attend à 18h30 en bordure de route.

Nous nous rendons alors à l'abri forestier du Haut-des-Faignes près duquel nous garons le Trafic. Nous y passerons la soirée et la nuit. Il y a un point d'eau.


Samedi 9 septembre 1995 : Calvaire Gérardfaing – Forges d'Uzemain.

Cumulus et ciel de traîne. Le temps se dégage.
A 10h15, au calvaire Gérardfaing, je poursuis mon parcours derrière une ferme et emprunte un chemin de terre.
Je chemine sur le plateau à travers les cultures et quelques hameaux ; je descends franchir le ruisseau du Cône à l'entrée d'un vallon. Un large chemin forestier va suivre ce ruisseau sous les pins et les feuillus jusqu'au chalet communal de la Torèle. [J'étais déjà passé par là le 1er novembre 1991 lors de la création de mon parcours nord-sud des Vosges.]
Un chercheur de champignons fouille le sol et ne me remarque pas.
Je monte alors à flanc dans les pins, les bouleaux et les chênes vers la crête. Je poursuis jusqu'à une aire de pique-nique et un point d'eau en bordure de route. Un chalet de chasseurs est ouvert. J'y lis quelques consignes de déontologie… Ça me fait penser que demain c'est l'ouverture de la chasse.
Je traverse encore le bois de Girombois et atteins la route Xertigny – Epinal où m'attend Viviane.

Nous retournons avec le Trafic manger à l'aire de pique-nique où je suis passé avant.

Ensuite, à nouveau sur place, je franchis le petit pont Napoléon qui enjambe la voie ferrée Epinal – Dijon. Je pénètre dans la forêt de Tillonhaye : larges chemins d'exploitation dans une forêt aérée. Je rejoins le ruisseau du Cône à la basse de Moyenpal, pour remonter à travers taillis, prés et forêts. Je parcours une ligne de crête qui domine et longe Uzemain. Après la ferme Brianhouche, je franchis à nouveau le Cône et poursuis sur des chemins de campagne.
J'atteins le hameau de Rasey ; puis par un chemin de champs j'arrive à 18h aux Forges d'Uzemain, baignées dans la luminosité du soir. Il fait beau. Le temps s'est dégagé en cours de journée.
Située à l'écart du village, la forge d'Uzemain a été fondée au cours du XVIIIe siècle. Fermée en 1880 et désaffectée, l'usine conserve d'intéressants vestiges : la maison du maître de forge, les logements d'ouvriers.

Après avoir bu un pot à Uzemain, Viviane et moi roulons jusqu'à Epinal. Nous passons la nuit au camping municipal.


Dimanche 10 septembre 1995 : Forges d'Uzemain – le Cuveau des Fées.

Nous passons une partie de la matinée au camping, puis nous allons nous promener à Epinal.

J'avais d'abord prévu de ne pas marcher aujourd'hui, pour cause d'ouverture de la chasse. Mais, impatient, je me décide quand même à repartir.
A 14h15 je quitte les Forges d'Uzemain, franchissant le canal de l'Est.
J'entre en forêt. Je débouche trois kilomètres plus loin au Pont Tremblant, près d'une écluse du canal de l'Est. Je remonte dans la forêt domaniale du ban d'Harol que je vais traverser sur des lignes de crête pendant plusieurs kilomètres.
Pas de problème de chasseurs. Tout juste quelques voitures garées ça et là, et quelques coups de feu. Au fur et à mesure de ma progression, le temps se couvre, tourne à la pluie.
J'arrive à la chapelle de la Miséricorde (412 m). Je me dirige alors vers le nord sur une piste forestière. Je suis surpris par une averse. Il est 17h30 quand j'arrive à un carrefour sur la petite route qui mène à Vioménil. C'est là que j'ai rendez-vous avec Viviane. La pluie s'est arrêtée.

Nous avisons une clairière au bord de la route dans un virage. Nous allons nous y installer, sur le parcours du GR qui y pénètre avec nous, 1 km avant le site du Cuveau des Fées.
Soirée dans le Trafic : le temps est humide et le vent se lève. Un forestier vient bientôt s'enquérir de la raison de notre présence. « Vous ne venez pas déverser des ordures, des fois ? »


Lundi 11 septembre 1995 : Le Cuveau des Fées – Darney.

Le temps s'est sérieusement dégradé : vent et pluie battante intermittente. Des chercheurs de champignons fouinent autour de la camionnette.
A 10h15, laissant Viviane sur place, je reprends mon chemin, pénétrant dans la forêt, revêtu de ma cape de pluie. Je m'égare non loin de là, tourne en rond, reviens sur mes pas sans m'en apercevoir. Entre-temps, Viviane est repartie.

C'est en m'enfonçant tout droit sous forêt que je rejoins la source du Madon. Le soleil réapparait, momen-tanément. J'atteins alors le site du Cuveau des Fées, à l'entrée du Vallon druidique ou vallée de la Blanche Femme.
Le culte druidique introduit par les Leuques, un peuple celte, y était célébré par des druidesses qui résidaient dans une grotte profonde. Tout le vallon atteste de l'intense activité de cette population gauloise. La région fut ensuite conquise par les Romains, et le christianisme se substitua à la religion druidique.
Une étrange pierre de grès bigarré, de forme octogonale d'un diamètre de 3,70 m, gît dans la forêt. Apparemment « fabriquée » sur place, elle a lentement glissé le long de la pente vers le ruisseau. En aval, le front de taille d'une carrière, l' « amphithéâtre », confirme l'hypothèse d'une cité d'agriculteurs, bûcherons et carriers. 



Je passe ensuite au Fanum, petit temple des druidesses, puis devant la chapelle St Martin construite à quelques pas de la grotte. Près de la grotte se trouve une source, la Fontaine le Bœuf.
Ainsi le sanctuaire chrétien a pris la relève du sanctuaire païen. Pendant des siècles, l'endroit a été occupé par des ermites. La chapelle, détruite il y a environ 60 ans, a été rebâtie en 1959 par les habitants d'Escles.



Quittant ce lieu chargé d'histoire, le GR 7 effectue un demi-cercle dans le bois de la Louvière sur une route forestière et grimpe ensuite tout droit dans une plantation récente. Le balisage blanc et rouge laisse à désirer. Par des layons et sentiers je rejoins une lisière sur les prairies entourant Vioménil. Je contourne l'étang de la Faignotte et arrive à l'entrée de Vioménil, où se situe la source de la Saône. Je n'entre pas dans le village mais poursuis tout droit jusqu'au bord de la Saône.
Je vais maintenant emprunter une petite route empierrée le long de la rivière qui n'est encore qu'un ruisseau se faufilant sous les arbres et dans des prairies humides. La route suit le vallon vers l'ouest. A 13h, j'atteins sous une nouvelle averse La Bataille, hameau perdu où subsistent des vestiges d'une ancienne verrerie. Partout dans la Vôge, on rencontre d'anciennes verreries, mises à feu depuis le XIVe siècle, et aujourd'hui toutes éteintes.
J'aperçois le Trafic garé sur un terre-plein. De la fumée et une odeur de cuisine s'en échappent. Viviane est en train de préparer le repas !

Je repars à 14h30, profitant d'une accalmie. Je franchis la Saône sur un pont de pierres et remonte dans le massif au-dessus de la vallée. Des chiens de chasse dévalent non loin de moi en aboyant.
J'emprunte route et tranchée forestières pour redescendre dans le val de Saône et franchir un affluent, le ruisseau de la Croisette. De hautes roches gréseuses avec des grottes dominent le val. Je poursuis dans la vallée, puis je remonte dans un massif forestier pour le traverser par une succession de tranchées rectilignes pendant 7 km.
Le ciel s'est peu à peu dégagé. Lorsque je parviens à la maison forestière du Carrefour, la clairière est ensoleillée. Je poursuis par la route forestière, je passe sous l'ancienne voie ferrée Darney – Epinal. Je remonte par un chemin herbeux entre les prés où paissent des chevaux. Je débouche alors sur les maisons de la Côte de Darney. Je contourne l'agglomération par le sud et descends sur la D5 au bord de la Saône. Il est 17h15. Je suis à l'entrée de Darney, localité d'origine celtique blottie au pied de son église et de son château.

Je retrouve Viviane. Nous allons boire un pot dans un bistro puis nous installer au camping municipal. Il est encore libre d'accès mais doit être en passe de fermer. Nous sommes en effet seuls dans l’enclos désert, excepté un camping-car d'Allemands qui nous rejoindra un peu plus tard. Nous profitons des derniers rayons du soleil en mangeant à l'extérieur du Trafic.
Je ferai encore une petite promenade de nuit sur les hauteurs du bourg.


Mardi 12 septembre 1995 : Darney – Saint-Baslemont.

Nous quittons le camping sans avoir rencontré quiconque pour nous faire payer.
A 10h je continue mon parcours. Le temps est couvert.
A l'entrée de la ville, le GR descend par un escalier de pierre, franchit une passerelle et entre à Darney.
Après avoir traversé la Saône, le GR remonte par une route en lacets sur les hauteurs autour de la ville. Il passe devant le monument tchécoslovaque : en 1918, à Darney, le président Poincaré remit leurs drapeaux aux légionnaires tchécoslovaques, reconnaissant l'indépendance et l'identité de leur pays.
Le GR chemine ensuite à découvert sur des allées et des routes à travers champs. Puis il traverse un bois, quelques passages marécageux, et rejoint une petite route. Un taureau, probablement échappé de son enclos, paît dans un pré au bord de la route. Ça va, il a l'air placide.
J'atteins le château de Lichecourt, un manoir du XVe siècle à l'origine, et ancienne maison forte de verrerie, plusieurs fois reconstruit. Par une petite route toute droite dans la forêt, je me dirige vers Relanges.
C'est un village adossé à la forêt, issu d'un prieuré clunisien du XIe siècle, avec des maisons cossues : habitat des nombreux bûcherons, sabotiers et tailleurs de pierre qui peuplèrent le village. Je visite l'église, une des plus anciennes des Vosges et l'un des plus beaux édifices de ce type en Lorraine.
Après la traversée du village, je monte en forêt. Il me faut mettre la cape, car la pluie s'est mise à tomber. Je passe à côté d'une roche remarquable, la « roche des Apôtres », gravée dans le grès au XVIIIe siècle par un sculpteur de Darney. Impressionnant !


Je descends alors en pente douce dans un vallon. Je rejoins les ruines du prieuré de Bonneval (XIIe siècle) et sa chapelle du XIVe. A quelques centaines de mètres de là subsistent des traces d'un camp celtique.
Je franchis le ruisseau de Bonneval pour remonter sous la bruine dans un thalweg. Je débouche alors dans des pâtures et, à 13h, arrive à Saint-Baslemont, village bâti au pied d'une forteresse du XIIIe siècle.

Viviane m'attend dans le village. Beau point de vue sur la forêt de la Vôge que je viens de quitter. Nous allons nous installer au-dessus du village pour manger rapidement dans le Trafic, au milieu de champs boueux. Agriculture intensive, champs remembrés balayés par les vents. Un tracteur retourne des étendues immenses sans haies ni vie. Désespérant !
C'est bien la fin du massif vosgien.

Nous repartons dans l'après-midi pour Schiltigheim, en Alsace.



Fin de la 1ère  période



Vendredi 13 septembre 1996 : Saint-Baslemont – Aureil-Maison.

Un an plus tard.
Nous avons passé la nuit au camping de Vittel (Vosges).
Nous gagnons dans la matinée Saint-Baslemont où Viviane me dépose.

L'itinéraire a définitivement quitté le massif vosgien, laissant derrière lui le plateau de la Vôge. Il atteint maintenant une zone de transition, la « plaine », propice aux cultures et à l'élevage, vaste ensemble de plateaux et de dépressions, prolongement des côtes de Lorraine, caractéristique de la bordure orientale du Bassin parisien.
Je commence à marcher au départ de Saint-Baslemont à 10h30. Il fait frais, et le vent souffle.
Le GR 7 avance sur la ligne de partage des eaux Mer du Nord – Méditerranée. Trois kilomètres après St-Baslemont, vers le Haut de Thiébaut (459 m), je m'égare entre pâtures et haies. Je perds beaucoup de temps à essayer de trouver le Haut de Suède où est censée se faire la jonction avec le GR 714. Je n'y parviendrai pas. Je retrouverai le GR 7 plus au sud à hauteur du col du Haut de Salins, sur une ancienne voie romaine.
L'itinéraire se situe maintenant sur les monts Faucille, entre plaine lorraine et plateaux saônois. Durant tout le parcours, je jouis d'un vaste panorama, de quelque côté que l'on se tourne : au nord les Côtes de Moselle et le plateau lorrain, à l'est les Vosges, au sud-est le Jura, au sud les plateaux saônois, au sud-ouest le plateau de Langres et à l'ouest les collines de la Meuse
Le GR emprunte la voie romaine et va la suivre pendant plus de trois heures : même direction, même altitude. Elle est momentanément goudronnée. Après la ferme du Haut de Salins, elle devient un chemin qui va tout droit entre bosquets et pâtures.
Je retrouve Viviane à 13h30 à une intersection. Mes pieds me font souffrir : les chaussures de marche ont provoqué des ampoules qu'il va me falloir endurer les prochains jours. Nous mangeons dans le Trafic à l'abri du soleil et du vent.

Je repars à 15h sur la voie romaine, passe à la ferme de Bel-Air et poursuis tout droit dans un milieu ouvert. Je longe un élevage industriel de poulets, entassés sur des grilles à claire-voie. Brrr ! Plus loin, des agriculteurs sifflent leurs vaches qui rappliquent pour la traite.
Je quitte la voie romaine pour emprunter la départementale 15, et un peu plus tard j'entre à Aureil-Maison, un hameau de la commune de Lamarche. C'est un de ces villages typiquement lorrains aux maisons accolées les unes aux autres le long d'une rue principale (alors que dans les Vosges gréseuses les maisons, tout en étant groupées, n'étaient pas mitoyennes).
Il est 18h. J'attends pendant au moins ¾ d'heure au milieu du village Viviane qui a du retard au rendez-vous !

Lorsqu'elle arrivera, nous retournerons passer la soirée au camping de Vittel où nous étions déjà la nuit dernière.


Samedi 14 septembre 1996 : Aureil-Maison – Bourbonne-les-Bains.


Je quitte Aureil-Maison à 10h30.
Je traverse des champs et des pâtures ; je grimpe ensuite dans la forêt de Morimond. Je chemine alors sur la crête et je gagne la limite départementale des Vosges et de la Haute-Marne. Je vais suivre cette limite vers le sud pendant 1,5 km par un chemin herbeux dans une jeune forêt.
Je quitte alors définitivement la Lorraine et je pénètre en Haute-Marne (région Champagne-Ardennes). J'emprunte la route forestière de Plain Bois qui devient goudronnée à la sortie du bois. La route serpente entre des prairies ensoleillées.
J'atteins à 13h25 une aire de pique-nique avec tables et bancs dans une clairière où je retrouve Viviane. Nous mangeons dans le Trafic en compagnie d'autres camping-cars.
Je repars à 15h, descends dans un chemin creux qui mène à Serqueux. Dans ce village, profusion de marques blanches et rouges, comme pour bien marquer qu'ici se termine le balisage du GR et qu'après il n'y a plus rien. En effet, une fois dépassées les dernières maisons, le GR 7 n'est plus entretenu, le balisage disparaît. Seules subsistent par endroits quelques très vieilles traces qui se devinent ici et là. Situation qui va perdurer pendant toute la traversée de la Haute-Marne jusqu'à Auberive.
Je quitte donc Serqueux par un chemin entouré de barbelés, au milieu des pâtures où paissent des bovins. J'atteins la ferme du Haut Pont, sur la départementale qui pénètre à Bourbonne-les-Bains. C'est là que je retrouve Viviane à 16h. Nous entrons en ville en Trafic.

Nous faisons une promenade à pied dans les rues du centre ainsi que quelques courses, et buvons un pot. Nous sommes frappés par le nombre important de personnes âgées qui déambulent dans les rues. Bourbonne-les-Bains est une station thermale pour les os, les articulations, les rhumatismes. Ce qui explique tout…
Nous allons ensuite nous installer sur les hauteurs de la ville dans un petit camping tenu par des personnes âgées, au milieu d'un verger. Seules quelques caravanes de retraités sont encore dans les lieux. Douceur de l'air… soirée agréable parmi les pommiers qui croulent sous les fruits.


Dimanche 15 septembre 1996 : Bourbonne-les-Bains – Varennes-sur-Amance.

Au matin, Viviane et moi quittons la ville en Trafic et roulons sur le GR 7 jusqu'à l'entrée du parc animalier.
C'est également à partir de Bourbonne-les-Bains que s'arrête la description de l'itinéraire sur topoguide. Il va me falloir continuer le GR avec des cartes au 25000ème achetées au fur et à mesure des régions traversées, et cela jusqu'à Saint-Chamont, dans la Loire.
Donc, Viviane me laisse à l'entrée du parc animalier à 10h30. Aujourd'hui le ciel est couvert. Et c'est l'ouverture de la chasse !
Je m'engage sur une large piste forestière qui longe d'abord le parc animalier puis pénètre dans le bois de la Réserve. A une bifurcation, j'entrevois un chat sauvage en chasse qui semble ne pas m'apercevoir. Plus loin je quitte la piste pour emprunter une ligne de coupe qui grimpe fortement sur les flancs de la côte Folot. Je croise la route départementale 130 venant de Coiffy-le-Haut. Tombée au pied d'un arbre, une vieille pancarte en bois, délavée, témoin d'un antique balisage, indique encore le GR 7. Je rencontre quelques chasseurs en vadrouille.
Le GR se poursuit en forêt par des chemins d'exploitation, sentiers et laies forestières. A la sortie du bois, à 12h30, je débouche sur des pâtures où je rencontre Viviane en Trafic, venue à ma rencontre. Nous sortons table et chaises et nous mangeons à côté d'une pâture, un peu avant le hameau des Granges du Val.

Je repars à 14h15.
Le GR parcourt depuis ce matin le Bassigny, un petit pays, zone de transition du sud-est du Bassin parisien.
Après le hameau, je longe une zone humide dans un vallon. Je croise des promeneurs du dimanche. Le temps est lourd. Après le passage de la D26, j'entre à nouveau en forêt, carte à la main, vu l'absence de balisage. Je traverse le massif forestier du Jeune Chenoi. Puis je débouche sur une route. Je la quitte pour un chemin d'exploitation qui longe des parcs à chevaux. Un jeune poulain, manifestement mal formé, a du mal à prendre appui sur l'une de ses pattes avant.
Deux petits ponts enjambent des ruisseaux, et je traverse le bois de Tranchequeue par un large passage herbeux récemment fauché. Le GR débouche au bas d'une colline où serpente la route qui monte à Varennes-sur-Amance. Je franchis la Petite Amance et retrouve Viviane à une intersection de routes sous la colline, à 16h20.

Nous cerclons dans la région avec le Trafic pour trouver un lieu où nous arrêter. Ce sera l'ancien camping de Coiffy-le-Haut, fermé aux campeurs mais néanmoins accessible, près du cimetière du village.


Lundi 16 septembre 1996 : Varennes-sur-Amance – Orbigny-au-Mont.

Ce n'est qu'au matin que quelqu'un viendra nous dire que le camping est interdit…

De retour à Varennes-sur-Amance, nous traversons le village, faisons quelques courses dans une épicerie et nous rendons à la Poste. On y apprend que la commune de Terre-Natale (dont fait partie Varennes) doit son nom à un écrivain romancier essayiste, Marcel Arland.
A 10h10, je descends brusquement par un chemin creux dans le vallon du ruisseau de Pré Soir. Le sentier va maintenant traverser le bois des Euillards  par des lignes de coupe arpentant les vallons successifs : montées et descentes raides, perpendiculairement aux courbes de niveau.
Arrivé à proximité d'une maison forestière, je poursuis au soleil sur une route non bitumée ; je descends traverser le ruisseau du val de Presles et remonte vers un petit plateau agricole à 360 m d'altitude. Je retrouve bientôt Viviane installée avec chaise longue et table de camping au bord d'une friche. Il est 13h. Pause jusqu'à 14h15.

Je repars alors sur la petite route, tout droit vers Marcilly-en-Bassigny. Dans la traversée du village, Viviane me rattrape avec le Trafic. Puis je bifurque à travers champs. Pas un arbre, et le soleil est chaud. L'absence de balisage est vraiment un problème. Relation de cause à effet : le sentier n'est plus utilisé. Je me fraie un passage dans un thalweg abandonné, le long de barbelés. Puis je rejoins le chemin qui mène à Troischamps. Après ce village, le parcours se poursuit sur une route départementale.
C'est après le franchissement de la voie ferrée que le GR 7 bifurque dans des pâtures. Il gravit la première côte qui forme la bordure nord-est du plateau de Langres.
Le plateau de Langres : formé de calcaires jurassiques, dont les marnes retiennent les eaux, pauvre et couvert de forêts, c'est la ligne de partage des eaux Manche – Méditerranée. Marne et Seine y prennent leur source.
Je débouche sur le plateau, à 429 m d'altitude, en bordure de vastes champs de maïs. Je marche le long de la route départementale qui mène à Orbigny-au-Mont. J'aperçois au loin le Trafic, garé à l'orée d'un bois sur une petite route perpendiculaire. Je rejoins Viviane à 16h45.

Nous partons alors à la recherche d'un endroit pour la nuit. Nous allons nous installer au camping de la Liez, à Peigney, qui surplombe un lac artificiel, le réservoir de la Liez.


Mardi 17 septembre 1996 : Orbigny-au-Mont – Langres.

Le matin, nous perdons du temps à rechercher mes papiers que l'on croit nous avoir été volés. C'est seulement devant le commissariat de Langres que nous les retrouvons dans le Trafic.

De retour près d'Orbigny-au-Mont à 11h, je m'enfonce dans la forêt.
Le sentier descend vers Lecey. Après la traversée du village, je me dirige vers la rive est du réservoir de la Liez, un des lacs artificiels créés sur le plateau en guise de châteaux d'eau, nombreux dans cette région. Le GR chemine le long de la berge sous une jeune forêt de pins. Quelques traces de balisage oubliées… Des cônes à moitié dévorés jonchent le sol et trahissent la présence d'écureuils. Le sentier contourne deux bras du plan d'eau avant de déboucher dans des prairies délimitées par des haies, des clôtures ou des murs en pierres sèches.
J'atteins une mauvaise route qui se dirige vers Orbigny-au-Val. J'avais rendez-vous à cette intersection avec Viviane. Mais je ne vois rien venir. Je fais plusieurs allers et retours le long de la route avant de la retrouver, en retard sur l'horaire prévu.
Après que nous ayons mangé, je poursuis sous le soleil, rejoins une route stratégique qui relie le fort de Plesnoy au fort de Peigney. Je descends à travers prés et clôtures : vue sur Langres et sa citadelle. Ce faisant, je longe le camping de la Liez où nous avons dormi cette nuit, et je rejoins la ferme d'Angoulevent. Descente à travers les rues du hameau jusqu'à la retenue du réservoir de la Liez.
La route plonge en contrebas du barrage (un ouvrage en béton), puis s'éloigne vers la vallée de la Marne dont la source est toute proche. Je franchis un petit pont contigu à la voie ferrée Chaumont – Gray, et je remonte vers le nord le long du chemin de halage du canal de la Marne à la Saône.
Je rattrape un tracteur qui fauche les fossés, je double quelques promeneurs.
Je quitte ensuite la berge pour franchir successivement le canal, la Marne puis la voie ferrée. La route mène tout droit vers Langres qui se profile en haut de sa colline. Le Trafic arrive en face de moi. Il est 16h30.
Nous continuons alors en fourgon et pénétrons dans la ville sous les remparts romains. Nous allons boire un pot au centre intra-muros.

Ensuite, après une balade en Trafic à Langres et dans les environs, nous retournons passer la soirée et la nuit au camping de la Liez. Une tempête est prévue pour cette nuit…


Mercredi 18 septembre 1996 : Langres – Vieux-Moulins.

Dernière matinée de marche.
A 9h45, j'essaie de retrouver en vain des traces du GR 7 dans Langres.
Le sentier pourtant chemine entre le centre-ville et la citadelle, s'insinue dans un parc public et descend de la colline le long de son versant ouest.
Le ciel est gris, le plafond bas.
Après le vallon de la Bonnelle, le GR 7 remonte vers Grand Buzon. Ici se détache une variante directe vers Noidant-le-Rocheux. Le GR proprement dit, lui, traverse le hameau de Buzon et débouche sur le plateau. Je passe au milieu d'un troupeau de moutons ; puis, après avoir cherché mon chemin, je m'engage sur le plateau au milieu des friches et des cultures, entrecoupées de bosquets et de haies. Corbeaux et rapaces planent lentement, un lièvre s'enfuit. A la Combe au Prêtre, un chemin creux sert de dépotoir (frigo, produits phytosanitaires…).
Le sentier atteint un ancien ouvrage militaire. Toute cette région est truffée d'anciens forts, situés à des endroits stratégiques autour de Langres. Blockhaus impressionnant percé de meurtrières, entouré de fossés. Le ciel gris et triste rajoute encore à une atmosphère lourde.
Puis c'est la descente vers Perrancey-les-Vieux-Moulins, village accroché au flanc d'un autre plan d'eau, le réservoir de la Mouche. Le GR 7 traverse le village, coupe un lacet de la route et longe l'extrémité marécageuse et inondable du lac. La végétation y est touffue.
Je grimpe en face sur l'autre rive et remonte vers la Combe au Chevalier. Nombreux indices de faune : noisettes, faines, glands, attaqués par des rongeurs et des oiseaux…

Sur les hauteurs, c'est le parcours du combattant pour suivre le sentier. Carte au 25000ème et boussole sont nécessaires pour garder le cap. Je traverse un champ entièrement labouré qu'est censé traverser le sentier de grande randonnée.
Justement, je rencontre un quidam qui me regarde avancer. « Je cherche le GR ! » Je lui réponds que j'y suis mais que ça ne se voit pas. Il me raconte qu'il est journaliste et qu'il fait un article sur les GR en Haute-Marne : laissés à l'abandon, les sentiers sont même volontairement supprimés par les paysans, partisans de l'agriculture intensive. Je lui livre mon expérience sur le sujet !
Il me reste à traverser un second champ labouré. A l'orée d'un bosquet, un ancien poteau indiquant le GR 7 est à terre, heurté malencontreusement par une machine agricole !
Sur la petite route en face, montant de Vieux-Moulins, arrive Viviane avec le Trafic. Il est 12h30.

Nous cherchons un endroit un peu plus sympathique, près d'un bosquet, pour manger dans le Trafic. Ensuite nous repartons dans le Jura où nous habitons maintenant. 




Fin de la 2ème période




Samedi 17 mai 1997 : Vieux-Moulins – Perrogney-les-Fontaines.

Week-end de Pentecôte.
Je commence à 17h50 une marche sur le plateau de Langres à partir de Vieux-Moulins.
Au départ d'une vieille fontaine, je quitte le village le long de la Mouche, la rivière qui alimente le réservoir éponyme.
Le GR 7 va maintenant longer toute la vallée de la Mouche. Quelques vieilles traces de balisage subsistent par endroits. Cheminant d'abord en lisière, le sentier atteint un marais en fond de vallée. Puis il grimpe sur les hauteurs qui contournent et verrouillent une sorte de reculée. Le chemin s'abaisse alors vers Noidant-le-Rocheux, un beau village qui occupe toute la largeur du vallon. Il parcourt à nouveau un fond de vallée, puis il remonte peu à peu jusqu'à la source de la Mouche.
Je traverse le bois du Prachey ; j'atteins tant bien que mal, aidé par la boussole, l'autoroute A31. Un passage souterrain me permet de la franchir, et je débouche sur un large chemin en lisière entre champs et bois. Je rejoins la D6 (à 445 m d'altitude), à un kilomètre de l'entrée de Perrogney-les-Fontaines.
Viviane m'attend en ce point, incertaine du lieu de rendez-vous, vu l'absence de balisage. Il est 20h.

Nous retournons nous installer pour la nuit au camping de la Liez, où nous avions déjà dormi les 16 et 17 septembre derniers.


Dimanche 18 mai 1997 : Perrogney-les-Fontaines – Vivey.

Viviane me dépose à 10h à Perrogney-les-Fontaines.
Des motards envahissent peu à peu les rues du village. Je m'éloigne sous le soleil à travers la campagne. A hauteur d'une croix romaine, je m'engage à travers champs vers une butte dominée par une tour de télécommunications. Le sommet est ceinturé d'un petit bois de conifères : c'est le Haut du Sec (516 m). C'est aussi le lieu de rendez-vous des motards !
Le GR va maintenant effectuer un long parcours sous forêt. Il passe sous les flancs du Haut de Baissey (point culminant de la Haute-Marne et du plateau à 523 m). Il pénètre dans la forêt domaniale d'Auberive ; il emprunte ensuite la route forestière de Combe Maîtresse pendant un long moment, avant de se poursuivre par des layons et des sentiers de coupe, arpentant les dénivelés du massif.
C'est ainsi que, débouchant dans des prés, j'atteins la vallée de l'Aube.
De 13h30 à 15h, je mange avec Viviane.

Près d'un petit pont à l'entrée d'Auberive, le GR longe la rivière sur sa rive droite. Il contourne la ville le long des murs de l'ancienne abbaye. Il franchit l'Aube, encore jeune rivière, pas très loin de sa source.
Retour vers le centre-ville d'Auberive. Le GR pénètre dans un parc public, sillonne quelques rues de la ville, en sort vers le sud.
A partir de là, le GR 7, qui avait depuis son origine adopté une direction générale est – ouest, s'oriente maintenant franchement vers le sud de la France.
Il mène par une petite route dans des prairies, dévie dans une sente herbeuse pleine d'orties et de ronces où il se perd au bord du ruisseau du Val Clavin. Je débouche près de la M.F. (maison forestière) du Val de la Coudre. Et là, miracle ! Un balisage blanc et rouge tout neuf réapparaît, mettant fin à la galère de recherche du sentier, que j'avais dû subir depuis Bourbonne-les-Bains. C'est quand même plus reposant !
Je poursuis dans un vallon, en lisière. Après la source du Gorgeot, je remonte un thalweg dans une forêt de feuillus pour atteindre le plateau. Le sentier chemine sous futaie, avec un agréable soleil rasant qui filtre sous les branchages. Je débouche sur une route à un point coté 464. Il est 17h45. J'ai parcouru 23 km aujourd'hui.
Viviane m'attend à une intersection, au bord d'un chemin qui descend à Vivey.

Nous repartons en Trafic à Auberive pour nous installer au camping municipal.
Un bon pastis au soleil…


Lundi 19 mai 1997 : Vivey – Grancey-le-Château.

A 10h, depuis le point où je suis arrivé hier soir, je descends jusqu'à Vivey.
Après le village, je remonte un thalweg jusqu'à la Croix au Loup, un calvaire en forêt commémorant un fait divers. Je traverse le bois de Sainte Ruffine, où je dérange un chevreuil. Je poursuis mon parcours en forêt, croisant plusieurs routes. Je débouche aux abords de prés et cultures dominant Lamargelle-aux-Bois.
Le GR traverse des champs de blé. Les épis encore verts forment une houle, ondulant sous une brise légère dans une douce luminosité. Des coquelicots agrémentent l'ensemble d'une touche de rouge vif.
Le sentier descend vers le village, remonte dans les pâtures puis entre dans le bois de Frétoy. Il atteint alors la limite sud de la Haute-Marne et un peu plus loin pénètre dans le département de Côte-d'Or, en Bourgogne.
Il traverse le bois de Faiseux et débouche dans des prairies, gagne la ferme de Borgirault, au milieu des cultures. Une mauvaise route irrégulièrement entretenue s'engage dans la Combe à la Demoiselle et mène à Grancey-le-Château, au pays des Trois-Rivières, à la limite des grandes forêts du Châtillonais : place forte édifiée en 1193, dominée par la puissante muraille de son château reconstruit au XVIIIe siècle. Viviane m'y attend à 12h45.


Nous allons manger dans la nature sur le trajet du retour avant de repartir à Beaufort, dans le Jura.




Fin de la 3ème période




Mercredi 17 septembre 1997 : Grancey-le-Château – combe de Prêle.

A partir de 15h, je commence une randonnée de dix jours sur le GR 7 qui se poursuit sur le plateau de Langres.
De la sortie sud de Grancey-le-Château dominé par sa puissante muraille, le GR suit la route qui conduit à la petite église paroissiale St-Germain, du XIIIe siècle, remaniée au XVIe. Je visite l'église, dans mon accoutrement de randonneur qui attire l'attention des riverains.
Le sentier longe ensuite le mur du parc du château à travers les bois de Saint-Germain puis de la Garenne. A la porte des Chanoines, il descend vers la vallée de la Tille-de-Bussières (une des Tilles, car elles sont quatre), longe la voie ferrée, atteint Courlon, traverse la Tille. Il remonte en sous-bois, traverse un plateau dégagé, redescend le long de la Creuse pour arriver à Avot, dans la vallée de la Tille.
Une statue de Diane chasseresse trône sur la place. 


Mais
pas de coup de feu (!) dans la traversée du bois de Chambremont (462 m) qui mène à la combe de Prêle et la fontaine de Champignolles, agréable source dans un cadre forestier.
Le sentier débouche sur une route où Viviane m'attend à 18h.

Nous descendons avec le Trafic dans la vallée. Nous nous installons à Marey-sur-Tille, dans un camping fermé mais libre d'accès, à côté d'un terrain de foot. La brume tombe avec la nuit…