Au matin, à 9h15, je reprends ma route. Il fait beau, il a gelé
pendant la nuit. La tempête n'a pas eu lieu. Un voile nuageux élevé de
cirrostratus recouvre le massif.
Le GR 7 pénètre dans le parc national des Cévennes.
De tous les parcs nationaux
français, il est le seul à être implanté en moyenne montagne et à abriter de
ce fait une population permanente significative. La richesse de la flore est
favorisée par la diversité de ses climats (océanique, continental et
méditerranéen), de ses sols (granitique, calcaire ou schisteux) et de
l'altitude de la zone protégée (de 378 à 1699 m ).
Pendant cinq jours, je vais parcourir le parc.
Du chalet, le GR suit la draille du Gévaudan qui se confond
parfois avec la route. J'atteins le col de Finiels (1541 m ), au milieu des
pelouses subalpines où pâturent les troupeaux de bovins. Au col, un énorme
taureau très impressionnant…
Ici le GR 7 abandonne l'itinéraire historique suivi par
Stevenson. Il emprunte la draille longeant la limite supérieure des
reboisements puis un très ancien chemin dit « voie romaine ». Il
descend ensuite par une piste peu distincte à l'est du Chaumadou. Des
randonneurs ont passé la nuit en cet endroit et font sécher leur tente.
Parcours difficile dans la rocaille.
Je gagne
Salarial, puis le hameau de l'Hôpital. Partout des troupeaux dans les pâtures.
Je continue sur la draille du Languedoc, en plein soleil, et je débouche au pont
du Tarn, vieux pont de pierre jeté sur la rivière.
Il est midi. Des randonneurs essaimés ça et là sous la
végétation pique-niquent au bord du Tarn, certains avec des chevaux ou des
ânes.
Dans les taillis de hêtraie d'altitude et des sapinières, le GR
7 se poursuit par la draille le long de la lisière ouest du bois du Commandeur.
A travers des pelouses marécageuses et des chaos de rocaille, j'atteins
l'Aubaret, un hameau d'altitude, à 13h.
Viviane et Oscar m'y attendent, en discussion avec des ramasseurs
de champignons qui viennent du Gard.
Nous mangeons dans le Trafic non loin de là. Un vent froid nous
oblige à rester à l'intérieur.
L'après-midi, je traverse le pont sur l'Alignon et poursuis au
sud par la draille. Au
Plo de la Nassette, la draille devient un chemin
carrossable. Il y a de plus en plus de voitures garées partout au bord du
chemin, immatriculées essentiellement dans le Gard. Le pillage des champignons
devient manifeste. La Lozère ,
avec ses 70 000 habitants, voit des hordes de ramasseurs du Gard venir chaque
année faire une razzia et emplir les coffres.
J'atteins la
Croix de Berthel (1088 m ). Une litanie de voitures est garée tout
autour. C'est ici la limite sud du mont Lozère.
Aux croupes granitiques font
suite les « serres » cévenols dont les crêtes schisteuses dentelées
se profilent sous un ciel lumineux.
Toujours par la draille, je gravis la montagne vers le sud,
heureux de quitter les chapelets de voitures du col. C'est vraiment très raide
! J'atteins le pied du signal de Ventalon (1350 m ). Des cairns de
micaschiste parsèment ça et là les crêtes au milieu des landes à genêts.
La draille plonge alors vers le sud, suivant toujours la
capricieuse ligne de partage des eaux, dans une végétation de plus en plus
méditerranéenne.
Au milieu des plantations de pins, je passe au col des Tours,
gagne le col de Chamblas. Là je quitte la draille pour un sentier à travers
bois. Un chien, assis sur son derrière, m'observe : c'est Oscar, suivi de près
par Viviane. Nous effectuons les deux derniers kilomètres sur un chemin
forestier. Les ramasseurs de champignons nous assurent que les coffres pleins,
si, si ! c'est pour leur consommation personnelle !
Nous arrivons au col de Jalcreste (833 m ) à 17h. C'est le
premier point en dessous de 1000
m depuis mon départ la semaine dernière. Nous buvons un
pot au col, à la terrasse d'un hôtel-restaurant, à côté d'une sculpture en
ferraille de Don Quichotte envahie par les lierres.
Nous descendons dans la
vallée, à Cassagnas. Nous y trouvons un camping en bord de rivière. Comme il se
doit, c'est le « relais de Stevenson » : une litière et du foin sont
prévus pour les montures. Le patron habitait il y a quelques années dans le
Jura, à St-Laurent-en-Grandvaux ! *
Ce soir, nous mangerons au
restaurant du camping.
* De 1998 à 2000, j'habitais moi aussi à St-Laurent-en-Grandvaux.
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